Vous en avez entendu parler des dizaines de fois, vous voyez ce que c’est « en gros », mais si on vous colle un contrôle surprise sur les ZAD demain matin, vous êtes bien embêtés. Pas de soucis, on vous comprend, et on a même décidé de vous aider : la ZAD pour les nuls, c’est juste en dessous.
La ZAD, kézako ?
ZAD est initialement l’acronyme de « zone d’aménagement différé », un terme très long et une définition très ambiguë pour simplement dire « Ici, on prévoit un gros chantier, de type construction d’aéroport, d’autoroute ou pourquoi pas d’un barrage ». Mais ce n’est pas exactement pour cela qu’on entend parler de ce « mot » ! En fait, les opposants à ces projets d’urbanisation et de bétonisation des sols ont ré-employé le sigle ZAD pour détourner son sens en « zone à défendre ».
Un espace à défendre, oui, mais comment ? Eh bien c’est là toute la spécificité de la ZAD ! Quand les pétitions ou les manifestations ne suffisent plus, les opposants occupent physiquement ladite « zone à défendre » pour empêcher le projet d’exister. Ils y installent de quoi dormir, manger et subvenir à leurs besoins autant de temps qu’il le faudra : une sorte de siège des temps modernes. Un camping engagé.
Qui sont les militants dans les ZAD ?
Un néologisme en créant souvent d’autres : les militants dans les ZAD sont tout simplement appelés « les zadistes ». Certains défendent des convictions écologiques, d’autres des conforts ou habitudes. Ils ne sont pas tous du même bord politique, ni des mêmes classes sociales, mais ils se battent tous contre la destruction de la nature pour des projets qu’ils jugent inutiles (d’ailleurs, pour connaître les grands projets inutiles et dévastateurs qui se tiennent non loin de chez vous, vous pouvez consulter la carte interactive des luttes créées et mise à jour par Reporterre).
Parfois, ils vont jusqu’à utiliser leur corps pour défendre. Par exemple, devant les engins de construction, certains font des chaînes humaines pour les empêcher d’avancer. D’autres n’hésitent pas à grimper ou à s’attacher à des arbres pendant plusieurs jours pour qu’ils ne soient pas rasés.
Depuis quand ça existe ?
C’est un mode d’action nouveau. Si on ne parlait pas encore de « zone à défendre », l’épisode du Larzac s’affiche comme l’ancêtre de ces mouvements de lutte. Évidemment, on fait référence au mouvement d’opposition des années 1970, durant lequel les paysans se sont rebellés contre le projet d’extension d’un camp militaire sur leurs terres. Pour empêcher la construction sur ces hectares, les opposants s’y installent. Le mouvement dure dix ans, et ce sont les militants qui remportent le bras de fer en 1981, avec l’élection de Mitterrand. On ne parle pas du Larzac comme d’une ZAD, mais dans l’organisation et le mode de lutte pacifiste par occupation du lieu, ça y ressemble quand même vachement.
Ce n’est que dans les années 2010 que le terme est popularisé, avec le mouvement de lutte contre le projet de construction d’un aéroport au nord-ouest de Nantes. C’est la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, considérée comme première zone à défendre, et exemple ultime de ce mode d’occupation.
Les ZAD famous en France
Dans le monde de la ZAD, Notre-Dame-des-Landes est une référence. La pointure de la zone à défendre. Le goat. Pendant près de 10 ans, des zadistes ont transformé ces quelque 1000 hectares occupés en une vraie société nouvelle, avec des habitations auto-construites, un média local, des moments de débats, et même, une boulangerie. Une occupation durable qui a mené en 2018 à l’abandon du projet par le gouvernement d’Edouard Philippe.
Et ce n’est pas la seule dont on a beaucoup entendu parler ! Durant la même décennie, et dans la lignée de Notre-Dame, des zadistes se regroupent à Sivens, dans le Tarn, contre un projet de barrage. Malheureusement, elle devient tristement célèbre quand, en octobre 2014, le militant Rémi Fraisse est tué par une grenade offensive lancée par un officier de gendarmerie. Cette décennie et ce drame propulsent le terme de ZAD en une des journaux, si bien que le terme fait son entrée au petit Robert en 2016.
Aujourd’hui, on en est où ?
En avril 2023, après de violents affrontements entre les forces de l’ordre et les opposants au projet de "méga-bassines" à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), Darmanin annonce la création d’une « cellule anti-ZAD » au sein du ministère de l’Intérieur. Son but : empêcher que quelconque nouvelle ZAD ne se forme en France. De son côté et au même moment, le ministre de l’Intérieur accuse le « terrorisme intellectuel de l’extrême gauche » et parle du collectif des Soulèvements de la Terre (un des organisateurs de la manifestation) comme d’ « ecoterroristes ». Des mots forts qui, selon Sylvaine Bulle, chercheuse à l'université de Paris au sein du laboratoire Anthropologie du politique, pour France Info, sont une tentative de Darmanin de « séparer la ZAD de l’écologie » pour instaurer la terreur et garder la main.
En septembre, cette équipe de juristes qui doit accompagner les préfets pour « prévenir la constitution de zone à défendre (...) et assurer leur démantèlement » est officiellement créée.
Qu’à cela ne tienne, des ZAD se sont quand même formées après l’officialisation de cette cellule ! A titre d’exemple, en octobre, des militants se sont installés sur le chantier du glacier de la Girose dans les Écrins, occupant pendant une semaine « la plus haute ZAD d’Europe ». Fin octobre, une ZAD s’installe également dans le Tarn par les opposants à la future autoroute A69 Toulouse-Castres. Une zone à défendre qui sera évacuée 24h plus tard par les forces de l’ordre à coup de lacrymos. Alors que, début décembre, le ministre des Transports a exclu tout arrêt du chantier, la lutte se poursuit du côté des militants.
Et ailleurs ?
Non, même si par définition « des gens pas contents qui se retrouvent entre gens pas contents sur un lieu qui met en colère » ça sonne vachement français, la ZAD n’est pas une création nationale. Certaines zones à défendre notables sont également apparues en Allemagne, comme avec le mouvement Hambacher Forst qui s'est opposé à l'extension d'une mine de charbon dans la région de la Rhénanie. Selon Reporterre, il existe même, au Japon, une ZAD contre l’aéroport de Narita qui perdure depuis les années 1960 ! Balaise.
Alors, vous y voyez plus clair ? Z’Avez Déchiffré tout ça ? (Oui, j’ai osé remplacé le « J » par un « Z » pour faire un jeu de mots douteux. Désolée de vous laisser là-dessus, avec une dad joke de ce level. C’est moche. Je sais.).
Z’avez-dit ZAD ? Résumé express
Les ZAD, initialement « zones d’aménagement différé », sont occupées par des militants appelés zadistes pour contrer des projets d'urbanisation. En France, des exemples notables incluent Notre-Dame-des-Landes et Sivens. Les ZAD sont des lieux de résistance face à des projets comme des aéroports ou des barrages. Les opposants, parfois qualifiés de « militants écologistes », installent des habitations et organisent des débats. Actuellement, les autorités tentent de limiter leur formation. Les ZAD existent aussi à l'international, comme en Allemagne et au Japon.