Faire comprendre et aimer les maths grâce à une appli presque aussi ludique que League of legends, mission impossible ? Pas pour Mathia. Rencontre.
Échec et maths : énoncé du problème. Sachant qu’une majorité d’élèves pense être nulle en maths, que plus les blocages commencent tôt et plus il est compliqué de les lever, qu’on adore répéter à l’envi que tout ça ne sert à rien alors que les maths sont au centre de la plupart des avancées techniques et technologies, comment redonner aux 5/12 ans le goût de la discipline ? Vous avez deux heures.
Vincent Escudé, co-fondateur de Mathia, lui, a pris deux ans. Deux ans de co-construction avec le terrain pour développer un assistant pédagogique qui accompagne les professeurs pour enseigner et faire aimer les mathématiques à tous les élèves du CP au CE2. L’idée centrale de son projet est, d’une part, de gamifier l’apprentissage des maths, de l’autre, de sortir de l’abstraction pour rendre la discipline plus concrète. “L’important c’est de voir les maths et de parler les maths, explique Vincent. Notre appli plonge l’enfant dans un univers mathématique où, aidé de son assistant intelligent MathIa, il va explorer, tenter, réussir, se tromper, obtenir des explications et des récompenses.”
Concrètement, pour illustrer les additions, plutôt que d’avoir des chiffres, des signes plus et des retenues, l’appli met en scène des éléments de la vie : des doigts, des boules de couleur… Aussi, pour rendre la discipline accessible, Mathia plonge l’élève dans une histoire, la quête d’étoiles par exemple. Grâce à la résolution de questions mathématiques, l’enfant progresse dans l’intrigue et, à chaque étape, répond en dessinant sur sa tablette ou en s’adressant vocalement à la mascotte qui le guide tout au long de son apprentissage : un genre de petit robot de l’espace. En fonction de ses réponses, grâce à l’intelligence artificielle, il chemine à son rythme et selon son niveau.
“Le principe de Mathia est de faire répéter les gammes mathématiques aux enfants, le rôle de l’enseignant reste central.”
Les maths c’est la vie ?
Le projet Mathia est soutenu par le programme Passerelles de la Banque des Territoires opéré par makesense. Objectif ? Entrer dans toutes les écoles primaires.
“On s’est appuyés sur les travaux du psychologue spécialisé en neuropsychologie Stanislas Dehaene qui portent sur les représentations mathématiques, précise Vincent. On veut aussi mettre plus d’émotion dans l’univers des maths et montrer qu’elles sont partout autour de nous.” Mathia a aussi et surtout impliqué des centaines d’enseignants et des milliers d’élèves pour parfaire sa solution. “On a commencé Mathia en 2019 après avoir remporté un Partenariat d’Innovation Intelligence Artificielle (P2IA) du Ministère de l’Éducation nationale avec Prof en poche, notre entreprise familiale de soutien scolaire et d’édition de logiciels éducatifs. Avec mon frère et ma sœur qui font partie de l'aventure, on a choisi de faire évoluer la boîte montée par mes parents vers un produit en mathématiques parce que c’est là qu’il y avait les plus gros échecs des apprentissages.”
À partir d’un prototype tout à fait imparfait, la fratrie Vincent, Paul, Sophie tous trois Escudé et leur coéquipier Samuel Imbert co-construisent et affinent pendant 15 mois la solution avec 200 enseignants de 9 académies. Pour l’étape suivante, la phase de pré-industrialisation, l’équipe met à contribution plus de 1000 enseignants. “Aujourd’hui, tous les enseignants de France du primaire ont accès à notre solution gratuitement, soit 135 000 professeurs des écoles et 2,4 millions d’élèves,” se félicite Vincent qui espère atteindre les 10 000 enseignants utilisateurs rapidement. Ce qui ne devrait pas tarder car l’appli est un vrai support pour les enseignants. En plus de donner des informations complètes sur l’acquisition des 298 compétences du référentiel de l’Éducation nationale en primaire, de présenter plus de 500 exercices, 80 parcours d’apprentissage et plus de 100 vidéos, elle propose aux professeurs de constituer des groupes d’enfants par niveau (en fonction de leurs “performances” sur l’appli).
“L’intelligence artificielle permet à l’enseignant de donner des exercices personnalisés à chaque enfant, témoigne Pascal Papin, utilisateur de la solution dans sa classe de CE2 en Haute-Garonne. Le bénéfice est très rapide car les enfants s’impliquent beaucoup plus dans les activités.” CQFD.